Meurtres.

La peur des schizophrènes.

 

Par Didier Déniel

www3.letelegramme.com/ig/generales/regions/bretagne/meurtres-la-peur-des-schizophrenes-10-05-2010-906843.php

 

Ce mois-ci, un homicide a été commis à Brest sur fond de schizophrénie. Une semaine plus tard, le décès d'un chauffeur de taxi en région parisienne a ému la population. Nous avons voulu en savoir plus sur les raisons qui poussent ces malades mentaux à passer à l'acte.

 

De nombreux cas de schizophrénie évoqués dans nos colonnes.

Le 17 avril, à Brest, une mère de famille était tuée de 20 coups de couteau.

Le père, grièvement blessé, ne devait son salut qu'à l'intervention d'un voisin. À l'arrivée de la police, leur fils, Mathieu, âgé de 21 ans, était interpellé et conduit aux urgences psychiatriques de l'hôpital de la Cavale Blanche. Le 25 avril, un chauffeur de taxi qui jouait avec son fils a été poignardé par un individu à Clichy-la-Garenne.

Les deux meurtriers présumés avaient été diagnostiqués schizophrènes.

Tout comme cet homme qui, le 2 avril, à Paris, aurait poussé sur les rails du métro un voyageur alors que le convoi arrivait en gare. Il est admis que les schizophrènes sont potentiellement plus dangereux que les personnes ne souffrant pas de pathologie psychiatrique. «C'est indéniable, explique le professeur Michel Bénézech, spécialiste en psychiatrie médicale et conseiller de la gendarmerie nationale dans les enquêtes criminelles.

10% des homicides sont commis par des personnes psychotiques, dont une grande majorité de schizophrènes paranoïaques.

Le risque de violence dans cette population est bien plus élevé. Violences contre les autres mais aussi contre soi. Car on estime que 10% de ces personnes ont de réelles tendances suicidaires».


De jeunes hommes en majorité.

Selon les spécialistes, plusieurs facteurs faciliteraient le passage à l'acte.

Généralement ces meurtriers sont des hommes, âgés de 25 à 35 ans, chez qui la maladie est installée depuis 10 à 12 ans. «Ils souffrent généralement de délires de persécution mystiques et sexuels», poursuit Michel Bénézech, qui a longtemps travaillé au sein de l'Unité des malades difficiles (UMD), à Cadillac, près de Bordeaux.

La consommation d'alcool, par son action désinhibante, peut également faciliter le passage à l'acte. Ce n'était pas le cas de Mathieu, à Brest, qui était sobre et qui aurait commis l'irréparable à 9h30 le matin. Le cannabis, lui aussi, est montré du doigt par les professionnels de santé. Cette substance faciliterait le passage à l'acte mais participerait aussi à l'installation de certains troubles.

Selon l'Inserm, l'Institut national de la santé et de la recherche médicale, «le risque de présenter des symptômes schizophréniques est supérieur lorsque l'on a consommé du cannabis au moment de l'adolescence. Comparés à des sujets n'ayant jamais consommé de cannabis plus d'une ou deux fois, les sujets en ayant consommé au moins trois fois à l'âge de 15 ans ou 18 ans ont un risque quatre fois supérieur de présenter des symptômes schizophréniques à l'âge de 26 ans».

 
Des signes annonciateurs.

À Brest, certaines personnes proches des enquêtes mettent aussi en avant le phénomène d'imitation. Mathieu et ses parents auraient évoqué un parricide commis quelques jours plus tôt par Mikaël Brenterc'h, un jeune comédien qui, sous l'empire de l'alcool, aurait tué son père quelques jours auparavant. Mathieu, très perturbé, aurait suivi le chemin meurtrier ouvert par Mikaël, chez qui aucun trouble psychiatrique n'a été diagnostiqué. «Cette thèse peut-être retenue, commente le professeur Bénézech.

Ça peut être un facteur déclenchant. Regardez ce qui se passe avec les pyromanes. Il suffit qu'un individu mette le feu pour que d'autres en fassent autant. Le même phénomène est constaté à France Télécom et les suicides en cascade. Certaines personnes dépressives n'auraient jamais intenté à leurs jours sans ces précédents». L'arrêt du traitement peut également aboutir à un drame. Mathieu, lui, avait réduit ses prises de psychotropes quinze jours avant le drame. Selon les psychiatres, l'arrêt d'un traitement à des conséquences extrêmement dangereuses. Passé un délai de deux mois, les effets des médicaments disparaissent complètement et les délires réapparaissent. Le problème, c'est que de nombreux patients n'ont pas le sentiment d'être malades. Bien souvent, ces drames pourraient être évités.

Les schizophrènes faisant part clairement de leur intention de tuer, «généralement dans les 10heures précédant l'acte», selon l'étude du Dr Millaud. C'était le cas à Clichy-la-Garenne où l'agresseur répétait depuis plusieurs jours qu'il voulait «butter quelqu'un». Contrairement à certaines idées reçues, les schizophrènes meurtriers ne s'attaquent pas à des inconnus mais à des membres de leur famille très proche. «Généralement la mère, précise MichelBénézech. Puis viennent le père, les frères et soeurs, les oncles et tantes».

Lorsqu'un fait divers particulièrement sordide et violent se produit, les politiques demandent que les portes des hôpitaux soient fermées à double tour. Le développement des Unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA), dont la première vient d'ouvrir à Bron-Le-Vinatier, dans le Rhône, est une réponse à ces demandes toujours plus sécuritaires. «Mais on n'avancera pas tant que l'on n'aura pas évalué la dangerosité des individus qui ont déjà commis des actes de violence, conclut le professeur Bénézech. Ceux qui posent réellement problème, une petite minorité, doivent être enfermés.

Cette responsabilité, malheureusement, revient uniquement aux médecins. L'idéal serait de confier cette mission à des commissions médico-judiciaires composées aussi de magistrats.

La justice doit aussi se prononcer».

ç Retour

lmlmlml

Page de mon site : http://champion20.monsite.orange.fr

Mise à jour le lundi 4 octobre 2010 - * maurice.champion20@wanadoo.fr *