Non-lieu psychiatrique
pour le meurtrier des infirmières de Pau.
Libération : De notre correspondante à Bordeaux
Laure Espieu
QUOTIDIEN : samedi 15 décembre 2007
Romain Dupuy n’ira
pas devant les assises. La chambre de l’instruction de la cour d’appel de Pau a
confirmé vendredi le non-lieu psychiatrique. Les juges ont estimé son
discernement aboli lorsque dans la nuit du 17 au 18 décembre 2004, le
jeune homme a poignardé Chantal Klimaszewski et Lucette Gariod, infirmière et
aide-soignante de l’hôpital psychiatrique de Pau, décapitant ensuite l’une
d’entre elles. Ils ont ainsi suivi l’avocat général qui dans ses réquisitions
évoquait un «brasier de délires», considérant que «sa responsabilité
pénale ne peut être engagée». Christian Saint-Palais, l’avocat de Romain
Dupuy, s’est dit «soulagé que les magistrats palois aient résisté au
mouvement de pénalisation de la folie», ainsi qu’à l’émotion et aux
pressions exercées par les politiques».
Incompréhension. «Nous disposons d’une
législation adaptée et suffisante, qui permet la tenue d’un débat
contradictoire», a-t-il ajouté, faisant référence à l’avant-projet de loi
réclamé par Nicolas Sarkozy au nom des victimes et destiné à permettre la comparution
des malades mentaux criminels. Dans les familles des deux soignantes, à
l’inverse, c’est l’incompréhension. D’autant que la décision intervient à trois
jours de la date anniversaire du double meurtre. «On est complètement
assommés. J’ai l’impression d’avoir pris une masse sur la tête», confie
Maria Mouledous, la sœur de Chantal Klimaszewski. Pour elle, il s’agit d’une «mascarade».
«Je ne crois pas du tout à sa pathologie, affirme-t-elle. C’est
quelqu’un de conscient, d’intelligent, à l’esprit vif. C’est un comédien qui
ment et qui a eu le temps de composer son histoire.»
Le 7 novembre dernier, le jeune homme
de 24 ans avait pu comparaître en audience publique, suite à un avis
médical favorable de l’établissement de Cadillac où il est interné d’office. La
procédure était exceptionnelle. Après le premier non-lieu, prononcé le
28 août dernier, au terme de l’instruction, les parties civiles avaient
immédiatement fait appel, et obtenu l’ouverture de débats contradictoire durant
trois jours.
«Extraterrestre». Devant la cour,
Romain Dupuy est donc longuement revenu sur sa flambée meurtrière, avec autant
de précision que de froideur. Il évoque d’un même ton détaché la scène de
décapitation ou sa conviction de découvrir au sein du pavillon psychiatrique «des
nazis qui avaient tous les pouvoirs. Ou des extraterrestres».
Quatorze experts psychiatres sont ensuite
revenus sur ses lourds antécédents, se relayant à la barre pour confronter
leurs analyses et tenter d’évaluer l’état de son discernement la nuit du crime.
Pour la majorité d’entre eux, Romain Dupuy était un schizophrène en crise,
incapable de résister à la folie de son geste. Un seul a soutenu qu’il
disposait encore d’une part de lucidité. La chambre de l’instruction, en
déclarant le meurtrier irresponsable, le retire désormais à l’autorité de la
justice, pour le confier directement aux médecins.
Ce changement de statut suscite beaucoup
d’inquiétude parmi les parties civiles. «C’est l’angoisse de se retrouver un
jour nez à nez avec lui dans la rue», pointe Jean-Paul Brin, avocat de
l’ancien compagnon de l’infirmière. «Un traitement psychiatrique n’est
jamais éternel, poursuit-il. Rien ne garantit qu’après une stabilisation
durable, il ne soit à nouveau dehors, capable de provoquer un accident grave.»
Yves Darmendrail, avocat des Gariod, va plus loin : «Il faut une évolution,
pour que la justice conserve un droit de regard sur ces individus. Notamment
lors de leur remise à la vie civile.» Les parties civiles étudient la
possibilité d’un pourvoi en cassation. Elles ont cinq jours pour se prononcer.
Quant à Romain Dupuy, informé de la décision par son avocat, il en a pris acte
sans manifestation particulière. «Mes parents vont être contents»,
a-t-il simplement noté.
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Mise à jour le lundi
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